L'est de l'Europe a connu au siècle dernier quatre cataclysmes majeurs, la disparition des Empires centraux, Allemagne et Autriche-Hongrie, la Révolution russe, la Seconde Guerre mondiale et la disparition de l'URSS. L'Ukraine est un témoignage vivant et terrible du destin des pays qui sont nés de ces cataclysmes.
L'UPA,
Украïнська Повстанська Армiя, Ukrains'ka
povstens'ka Armiya
ou УПА, fut
le bras
armé de l'aile Bandera de la Orhanizatsyia Oukrainskykh
Natsionalistiv ( Organisation des nationalistes ukrainiens ; OUN ).
Dés
la
fin de l'été 1942, des émissaires de l' OUN , dirigé par Vasyl
Sidor, gagnèrent
la Volhynie afin
d'organiser
des formations ukrainiennes armées
dans la région et y
trouvèrent
des groupes de résistance qui avaient déjà vu le jour. Parmi eux
se trouvaient le Poliska Sich ( Unité de Polésie ) unités
commandée par Maksim Borovets, dont le nom de code était Taras
Bulba. Les émissaires cherchèrent
à
unir les groupes et à
les
fondre
dans une armée nationale ukrainienne ; la première unité vit
le jour le 14 Octobre 1942, que
l'on considère comme la
date de
naissance de
l'UPA. Le 1er Décembre 1942, quand la Ukrainisches
Legion
( Légion ukrainienne ), qui comprenait
les
unités Nachtigall
et
Roland,
fut
démantelée,
un groupe d'officiers ukrainiens rejoignit
l'UPA. L'un d'eux était Roman
Choukhevytch, qui fut
nommé
commandant de l'UPA , avec le nom de code de
Taras
Chuprynka. En Mars 1943, six mille à
douze mille hommes (selon les sources)
de la Ukrainische
Hilfspolizei
( police
auxiliaire ukrainienne
dont le rôle était de chasser les Juifs, garder les lignes de
communication contre les partisans, les communistes, les komsomols)
désertèrent
en
Volhynie, en gardant leurs armes avec eux, et rejoignirent
l'UPA, ajoutant
une
force militaire
considérable et
accélérant
sa consolidation ; à la mi - 1943, des
unités
de l'UPA furent
formées
en Galicie orientale, en
Bucovine
et en
Ruthénie.
En
Septembre 1943, l'organisation de l' UPA fut
modifiée: l'Etat
major de l'OUN devint
celui de l'UPA, et le lieutenant-colonel
Choukhevytch ( « Général Chuprynka ») fut
nommé commandant. Les Théâtres
d'opérations de l'UPA furent
répartis en quatre régions
: ( a) du Nord : Volhynie et Polésie ; ( b ) de l'Ouest: la Galicie
orientale , la Bucovine , la Ruthénie , et la région de la rivière
San, ( c ) et ( d) du Sud et de l'Est : les parties de
l' Ukraine soviétique dans ses frontières
de 1939. Les régions(
c ) et ( d) n' existèrent
en tant que telles
pour une courte période seulement, et furent
supprimées
lorsque l'armée soviétique reprit
la région. Les unités
de l'UPA furent
réorganisées
afin d'améliorer leur flexibilité tactique et e leur permettre de
fonctionner clandestinement.
L'unité de base était le bataillon ( kuren ), composé de quatre
cents à huit cents combattants, divisés
en compagnies ( sotnia ), pelotons ( Choten
), et les escouades
(Roy) .
Dans la seconde moitié de 1944, l'UPA
commença à
attaquer la Wehrmacht saisir des
équipements et
capturer des soldats sur les arrières des unités
de combat allemandes. Les Allemands réagirent
violemment en lançant des
raids de grande envergure, mais sans
succès. Le 15 Juin 1944, un conseil fut
créé, L'Oukrainska
Holovna Vyzvolna Rada ( Conseil suprême ukrainien de libération ;
UHVR ), l'aile politique
de l' UPA, majoritairement contrôlée par
Bandera et ses partisans. Un accord fut trouvé avec les Allemands
pour combattre l'Armée rouge, ceux-ci refournirent des armes à
l'UPA et entrainèrent leurs unités. Avant
la retraite allemande à la mi - 1944, la Volhynie (centre
et sud) était
contrôlée
par l'UPA, ainsi
que de vastes zones de la Galicie
orientale, comme la Bobrka, Przemysl, Berezhany, et Rogatin.
L'affrontement
avec l'URSS et la Pologne .
Lorsque
l'Armée rouge libéra
l' Ukraine occidentale (entre le 22 Juillet et le 3 Octobre 1944),
l'UPA commença une
lutte acharnée avec les armées
soviétiques. Au début de 1945, le
conflit armé gagna
la partie sud du district de Lublin et la région de la rivière San
avec l'armée polonaise.
Les Soviétiques et les Polonais durent
employer d'importantes forces de sécurité
(régiments du NKVD)
ainsi que des unités régulières,
pour faire face à l'UPA . Les forces
de l'UPA tuèrent au
cours de ces combats le général
soviétique Nikolai Vatoutine ( un des très
bons officiers de l'Armée rouge) , qui
commandait le premier front ukrainien (2
Mars 1944), et le général polonais Karol Swierczewski dit
Walter, ancien des Brigades internationales, incompétent notoire
mais policier zélé,
et l'un des
commandants de l'armée polonaise (28 Mars 1947), ainsi que nombre
d'officiers et
de policiers.
La
liquidation de l'Organisation .
Il a
fallu attendre un certain temps après la fin de la guerre, à l'été
1947, les Soviétiques, les Polonais, les Tchèques coordonnèrent
leurs opérations contre l'UPA dans cette
zone dite des trois frontières et lui
portèrent les coups
décisifs au
cours desquels, le général Chuprynka (
Choukhevytch ) fut
tué (5 mars 1950).
Au début de 1951,
l'organisation armée était
quasiment liquidée;
la plupart de ses hommes tombés dans la bataille, et seuls quelques
groupes, réussirent à se frayer un chemin
à travers la Tchécoslovaquie vers
la zone d'occupation américaine
en Allemagne. La répression, malgré des
amnisties régulières destinées à vider
les maquis fut très dure, les
Soviétiques déportèrent
des dizaines de milliers d'Ukrainiens et des villages entiers furent
vidés de leurs habitants ; la
Pologne, fait
qu'on on oublie souvent,
déporta
tous les Ukrainiens (100 000)
de la région de la rivière San et des
districts de Lublin pour
les réinstaller dans les zones auparavant
allemandes qu'elle avait annexé à
l'ouest. En 1953, l'organisation
était redevenue complètement clandestine.
La destruction des juifs d'Ukraine
Tout
au long de 1943, l'UPA a combattu principalement contre le mouvement
partisan soviétique. Le paroxysme
fut atteint à
l'été, lorsque le corps de partisans soviétique, commandé par le
général Sidor Kovpak, fit
campagne dans les montagnes des Carpates sans
pouvoir déloger l'UPA. Au cours des
combats, les unités de l'UPA assassinèrent
en masse les Juifs qui s'étaient réfugiés
dans les forêts et dans les villages.
Norman
Davies estime que 140 00 juifs furent tués au cours de ces
opérations auxquelles participèrent les Allemands.
L'antisémitisme
étant général à l'époque, il convient de souligner que les
Polonais étaient aussi dangereux que les nazis comme l'ont souligné
dans leurs témoignages les rares survivants de l'insurrection du
camp d'extermination de Sobibor.
« On
sait que 365 détenus s'échappèrent et que seuls 47 ont survécu à
la guerre. Les Allemands en rattrapèrent 107 qui furent assassinés,
la résistance polonaise en tua 53, parmi eux Léon Felhendler et
Kitty Gokkes, le dernier jour de la guerre. » (Micha
Kersten Zwolle: "Death Camp Sobibor" 1998 )
En
Mars 1943, l'UPA
entama un véritable génocide
des paysans
polonais
installés dans ces régions
Aleksander Korman dans
"Stosunek UPA do Polaków na ziemiach poludniowo-wschodniej II
Rzeczypospolitej" (L'attitude de l'UPA face aux Polonais des
territoires du Sud-Est de la 2 e
République), NORTON-Wrocław, 2002; (l’auteur a répertorié 362
méthodes de torture pratiquées par les nationalistes ukrainiens sur
les Polonais et façons de leur infliger le coup mortel,
d'abord en Volhynie et plus tard dans la Galicie orientale en
1944. La première attaque connue fut celle
contre le village d'Oborkin le 13 novembre 1942 dans le canton de
Luck où les Ukrainiens assassinèrent 50 Polonais. Le nombre de
victimes parmi les Polonais est toujours
sujet de discorde, les historiens ukrainiens
de l'Ouest minimisent les chiffres (30-40
000). Norman
Davies parle
de 60 000 - ? morts au moins,
il mentionne «500
000 Polonais tués en 1943"
mais signale que
le président Kravtchouk en 1993 a
du recevoir les mauvais chiffres.
Jan P.
Gross (Polish
society under German occupation, Princetown, New York 1979)
60 000 à 80 000 ; de 300
000 à
400 000 selon
la Commission d'enquête polonaise sur les crimes commis contre la
Nation polonaise, chiffre à l'évidence exagéré.
Le nombre
de victimes oscille entre 30 000
[historiens ukrainiens
de l'Ouest] et 120 000 [cité par Wiktor Polishchuk]. Wiktor
Polishchuk souligne que les crimes les plus
terribles ont été commis par les Bespeka
[gardes de sécurité] de l'UPA,
la police interne
de l'UPA, commandée
par Dimitr
Kupiak, cryptonyme de « Klej », chef des Services de
Sûreté de l'UPA (réfugié
au Canada après la Seconde Guerre mondiale),
un cercle
relativement étroit de meurtriers tous
fanatiques de
Bandera. Il souligne également que le
recrutement et la discipline
de fer de cette
organisation était basée sur la terreur
de sorte qu'elle
ne pouvait pas être considérée
comme un mouvement d'indépendance véritable où
l'on est normalement volontaire. Car
l'UPA a tué
aussi bon nombre d'Ukrainiens qui n'étaient pas en accord avec ses
options.
Le
nombre des
Ukrainiens massacrés par l'UPA demeure
inconnu, cela va
de membres de l'OUN non ralliés à leurs positions, d'Ukrainiens
aidant des Polonais, des Russes, des Juifs, aux Ukrainiens refusant
de tuer leur conjoint non ukrainien, comme on l'a pratiqué
couramment au cours des massacres (pratiques qui ont resurgi lors de la guerre de Yougoslavie).
Les
historiens communistes
mentionnent sans s'attarder
la chose et
toutes ces questions ont été longtemps
taboues en URSS
comme en Ukraine. C'est un peu avant
l'éclatement de l'URSS que l'on a commencé a sérieusement
s'intéresser à ces questions.
Suite dans un prochain post.